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Dans les années 1970, à Fort Worth au Texas, la maison Bass, œuvre de l’architecte Paul Rudolph, était bien plus qu’un lieu de vie : elle servait d’écrin à l’extraordinaire collection d’art d’Anne et Sid Bass. En mai, Christie’s dévoilera au public près de 60 millions de dollars d’œuvres issues de cette demeure privée.
Une maison pensée comme une galerie d’art
Conçue pour honorer la passion artistique d’Anne Bass, la Bass House ne suivait pas les codes habituels des propriétés texanes. Paul Rudolph y avait incorporé des murs vertigineux et des puits de lumière pour baigner d’une aura muséale chaque recoin. Les œuvres n’étaient pas simplement accrochées : elles étaient mises en scène dans un espace architecturalement pensé, aux transitions fluides entre les pièces et les perspectives ouvertes.
Le jardin aussi participait à cette immersion artistique. Imaginé par les maîtres paysagistes Robert Zion et Russell Page, il enveloppait la maison d’un environnement poétique et structuré, propice à la contemplation. Anne Bass ne voyait pas ses sculptures et ses toiles comme des biens à accumuler, mais comme un dialogue entre l’art, l’architecture et la nature.
Une vente historique orchestrée par Christie’s
Du 12 au 15 mai, la maison Christie’s dévoilera au Rockefeller Center de New York la sélection intitulée Art from the Bass House, dans le cadre de la prestigieuse Marquee Week consacrée aux XXe et XXIe siècles. Cette vente aux enchères proposera 19 œuvres provenant directement des murs de la maison privée. À lire Comment j’ai gagné énormément de places dans mes valises en voyage
L’ensemble représente une estimation totale dépassant les 60 millions de dollars – à la hauteur de la réputation d’Anne Bass comme grande collectionneuse. Christie’s, déjà partenaire de la succession Bass en 2022 avec une vente record de 363 millions, revient ici avec des lots tout aussi marquants, révélateurs du goût sûr et recherché de la mécène.
Mark Rothko en tête d’affiche
La pièce maîtresse de la vente est signée Mark Rothko : l’œuvre No. 4 (Two Dominants) (Orange, Plum, Black), dont l’estimation avoisine à elle seule les 35 millions de dollars. Cette toile occupait une place d’honneur dans le salon de la maison, où elle dialoguait avec un second chef-d’œuvre : Itata de Frank Stella, de la série Notched-V, évaluée entre 6 à 8 millions de dollars.
D’autres icônes de l’abstraction américaine figurent également dans la sélection. Blue Black Red d’Ellsworth Kelly, installé dans la salle de jeux de la résidence, est estimé entre 4 et 6 millions de dollars. Chacune de ces pièces a fait partie du quotidien d’Anne Bass, intégrée avec soin à son univers esthétique.
Une sensibilité portée par la danse et la couleur
Parmi les œuvres les plus intimes figure Danseuse de Gino Severini, tableau futuriste aux couleurs vibrantes, qui trônait dans la bibliothèque personnelle d’Anne. Appréciée pour son énergie chorégraphique, elle résonnait particulièrement chez cette mécène du New York City Ballet, passionnée de mouvement et d’harmonie visuelle. À lire Les teintes incontournables pour sublimer votre porte d’entrée en 2025
Ce tableau, estimé entre 1,5 et 2,5 millions de dollars, est l’un des témoignages clés de l’univers sensible d’Anne. Elle y trouvait un écho à sa propre vision du monde : un équilibre entre rigueur, beauté et expression poétique. Chaque œuvre de la Bass House était ainsi chargée de sens et placée avec minutie.
L’héritage d’Anne Bass se poursuit à travers ses œuvres
Décédée en 2020, Anne Bass laisse derrière elle un pan entier d’histoire culturelle américaine. Propriétaire d’un prestigieux appartement au 960 Fifth Avenue à New York (vendu 53,5 millions de dollars en 2023), elle avait confié à Christie’s une première partie de sa collection en 2022, incluant deux Rothko, la célèbre Petite danseuse de Degas et un Monet.
Avant la vente de mai, les œuvres seront exposées à Londres (5–8 avril) et Hong Kong (20–21 avril), avant leur grand retour à New York. Cette tournée mondiale illustre l’ampleur de l’héritage d’Anne Bass, dont la maison au Texas fut discrète mais raffinée, et désormais reconnue comme un sanctuaire d’art exceptionnel.